Qu’elles se déroulent sur l’eau ou sur la terre, les activités de recherche du Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins (GREMM) constituent une source inépuisable «d’histoires de baleines», souvent racontées dans des carnets de terrain.
Or, le volet «éducation» du GREMM comporte aussi son lot de récits! Notre équipe de naturalistes vous invite donc sur son terrain, le Centre d’interprétation sur les mammifères marins (CIMM), pour une journée en compagnie de squelettes de baleines et de visiteurs curieux.
Observations prolongées
10h. Nous ouvrons les portes du CIMM pour qu’entrent les quelques personnes qui font déjà la file devant le bâtiment. Ils ont profité de leur attente pour scruter l’embouchure du Saguenay, à l’affut des petits dos noirs ou blancs qui pourraient en surgir. À l’intérieur, un autre type d’observation de baleines les attend : celle de nos géants immobiles.
Masques ajustés, mains désinfectées, les visiteurs franchissent le seuil du CIMM. La saison s’avère particulière, marquée par la mise en place de mesures sanitaires, mais surtout, par l’inauguration d’une salle d’exposition agrandie et enrichie de trois nouveaux squelettes de baleines. Après un long processus — préparation des os, touches finales, déplacement— ils peuvent enfin être admirés par les visiteurs depuis le 1eraout.
Contacts prolongés
En entrant dans la salle d’exposition, la plupart des gens s’exclament devant l’immensité des quinze squelettes déployés devant eux. « Parce qu’ils sont au-dessus de nous, on a vraiment l’impression d’être immergés dans l’eau, avec les baleines. C’est un point de vue unique!», insiste Laurence, naturaliste au GREMM pour l’été. Alors qu’elle circule dans la salle, plusieurs curieux l’interrogent sur l’anatomie des baleines, ou lui font part de leurs observations faites la veille.
Cette année, ils ne sont qu’une trentaine de visiteurs à la fois, ce qui permet aux naturalistes d’offrir «une visite plus personnalisée», remarque Aurélie, habituée à voir la salle remplie au maximum de sa capacité (plus de cent personnes!) l’été précédent. Inévitablement, certaines actualités nourrissent les préoccupations des gens, remarque-t-elle.
Ponctuellement, Laurence attire l’attention de tous les visiteurs dans la salle. Les sons provenant des bornes interactives diminuent; sa voix s’élève pour présenter les squelettes. Pendant près d’un quart d’heure, elle nomme leur espèce, décrit leurs comportements et s’attarde à leurs particularités: les traces de collisions sur la baleine noire Piper, la fausse dent du cachalot ou bien le fœtus intact du petit rorqual femelle. Par l’entremise de ses récits, elle redonne vie à chacun d’entre eux.
Sa présentation terminée, les lumières s’éteignent et des chants de baleines s’élèvent. C’est le Ballet des baleines, une activité en sons et lumières de trois minutes. «Je vous invite à contempler les squelettes et à écouter les chants de baleines pour vous immerger avec elles», affirme la naturaliste avant de laisser toute la place à la trame sonore de Normand Pierre-Boileau.
Magnifiés par les éclairages de l’artiste Caroline Ross, les squelettes semblent presque se mouvoir, révélant ainsi leur fragilité. Ce ne sont plus des géants lointains, de petits dos observés à l’horizon ou même des histoires de squelettes, mais plutôt des animaux qui ont déjà parcouru les mers. Lorsque les lumières se rallument, il faut plusieurs secondes aux visiteurs, parfois à la naturaliste, pour revenir à la réalité de l’exposition.
Éteindre les lumières
18h. Après plusieurs cycles de présentations, questions et émerveillements, il est temps de fermer la salle. Les squelettes et les bornes se fondent dans la noirceur tandis que les derniers visiteurs sortent du CIMM, habités par leurs découvertes, et peut-être par une nouvelle passion. «Je crois que c’est ce que j’aime le plus du métier de naturaliste; de savoir que certaines personnes voudront continuer d’apprendre sur les mammifères marins en sortant d’ici», affirme Sarah, naturaliste et rédactrice pour Baleines en direct.
Sur le chemin du retour, les regards croisés dans les rues de Tadoussac sont les mêmes que ceux côtoyés pendant la journée. Les naturalistes se dirigent vers la maison, mais leur travail n’est pas tout à fait fini. Motivées par les questions et les réflexions des visiteurs, elles se lancent dans des recherches qui nourriront possiblement leurs prochaines présentations, ou discutent longuement avec leurs collègues, devenues leurs amies le temps d’un été au CIMM.