Le mal des caissons est un accident de décompression associé principalement aux plongeurs utilisant une bonbonne à air comprimé. Comme le détendeur fournit de l’air à pression ambiante, plus la pression augmente en descendant en profondeur, plus les gaz inspirés, comme l’azote, se dissolvent dans le sang. La concentration d’azote dans le sang est donc beaucoup plus grande qu’à la surface. L’azote, ne pouvant être évacuée que par les poumons, si les plongeurs remontent trop vite à la surface, l’azote n’a pas le temps de revenir assez vite vers les poumons. Il se forme alors des bulles d’azote dans les tissus corporels, pouvant engendrer plusieurs lésions et traumatismes. On pensait autrefois que ces accidents ne concernaient pas les plongeurs en apnée, comme il n’y a pas d’échange d’air sous l’eau car ils plongent avec une seule inspiration en surface. Toutefois, il a été démontré que ces derniers, en fonction du temps de plongée, de la profondeur et de l’intervalle passé en surface pouvaient, eux aussi, subir certains dommages liés au mal des caissons.

Les mammifères marins, champions en apnée, possèdent des adaptations morphologiques, physiologiques et comportementales pour réduire l’accumulation d’azote dans les tissus, mais aussi pour gérer celui accumulé. Malgré ces adaptations, certains individus pourraient subir des accidents de plongées suite à un stress. Les baleines réagissent à ce stress en modifiant leur profil de plongée (temps et profondeur), provoquant une sursaturation excessive des tissus et la formation de bulles d’azote. Ce stress peut être d’origine anthropique comme l’utilisation de sonars et les activités sismiques qui produisent de puissants sons dans le milieu marin.

En 2002, un échouage de baleines à bec aux îles Canaries coïncide avec des tests de sonars militaires réalisés dans la région. Dans une étude de 2004, des squelettes de cachalots présentent des os troués et érodés, signe typique de l’ostéonécrose, une maladie chronique qu’on retrouve à long terme chez les plongeurs en apnée. Cette maladie est causée par une mauvaise gestion des patrons de plongée répétée, provocant la formation de bulles d’azote dans le corps.

Des chercheurs de la University of North Carolina Wilmington ont étudié les tissus adipeux situés dans la mâchoire des baleines à dents. Ces tissus, utilisés pour faire de l’écholocalisation, sont reconnus pour absorber de bonnes quantités d’azote. En fonction du type de matière adipeuse et de la profondeur de plongée de l’animal, on serait en mesure de mesurer quelles espèces sont les plus sujettes aux accidents de plongées. Plus la matière adipeuse absorbe de l’azote et plus l’espèce serait à risque. Leurs résultats ont été publiés en août 2015 dans le Journal of experimental biology. Beaucoup de travail de recherche reste à faire pour approfondir cette question encore mystérieuse.

Pour en savoir plus:

Le tissu adipeux de la mâchoire

Qu’est-ce que le mal des caissons?

Les cachalots et le mal des caissons

Comment les baleines peuvent-elles résister à la pression?

Les baleines en questions - 9/9/2015

Camille Bégin Marchand

Camille Bégin Marchand a travaillé au GREMM de 2013 à 2018. Elle a commencé comme naturaliste au Centre d’interprétation des mammifères marins, mais son intérêt pour l’écriture scientifique l’a menée à travailler comme rédactrice pour Baleines en direct. Passionnée par la biologie et amoureuse de la région, elle fait aussi une maitrise en sciences de la forêt en collaboration avec l’Observatoire d’Oiseaux de Tadoussac.

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