Les baleines ne révèlent qu’en un instant une infime partie de leur corps, laissant le doute sur qui elles sont. Heureusement, quelques indices aiguillent les observateurs.
Pour ceux qui suivent les mouvements des petits rorquals, il n’est pas toujours évident de distinguer ces baleines de leurs « grands cousins » les rorquals communs. Les deux espèces ont la peau noire et un corps fusiforme. Toutefois, les rorquals communs mesurent presque le double de la taille des petits rorquals et jusqu’à quatre fois leur poids. Le souffle du petit rorqual est peu visible ; celui du rorqual commun, haut de 4 à 6 m s’entend de loin. À la surface, l’évent du rorqual commun apparait bien avant sa nageoire dorsale alors que chez le petit rorqual, tout se révèle simultanément.
En tenant compte de ces repères, il devient plus clair que l’individu vu au large de Pointe-des-Monts le 15 aout est un rorqual commun alors que celui en face de Port-au-Persil le 14 aout est un petit rorqual. Justement, les petits rorquals sont nombreux dans plusieurs régions du Saint-Laurent : à l’embouchure du Saguenay, le long des rives escarpées de Charlevoix et de la Côte-Nord et dans la baie de Gaspé.
Quatre rorquals communs sont remarqués dans l’estuaire. Une journée, deux rorquals communs sont accompagnés d’un rorqual bleu en face des Escoumins. Le massif rorqual bleu est Chameau, probablement l’un des plus célèbres de son espèce dans l’estuaire. Connue depuis 1991, cette femelle fréquente régulièrement l’estuaire. On la reconnait aisément par la profonde dépression sur son dos.
Comment distinguer un rorqual bleu d’un rorqual commun ? S’il s’agit des deux plus imposants animaux sur la Terre, le rorqual bleu pèse quasiment deux fois plus lourd que son proche parent. Son souffle est audible sur plusieurs kilomètres et peut atteindre plus de 6 m de hauteur et émerge d’une paire d’évents de taille remarquable : entre 40 et 50 cm. La « robe » du rorqual bleu est pâle, bleu-gris, et mouchetée.
Du côté du cap Gaspé, au moins trois rorquals bleus sont notés. De l’autre côté du fleuve, un rorqual bleu et deux rorquals communs sont photographiés au sud-est du banc Ouellet dans la région de Sept-Îles. Les rorquals à bosse Capone et Bad Chemistry — avec son nouveau-né — sont identifiés. C’est Jacques Gélineau, responsable des inventaires de mammifères marins pour le projet de caractérisation de la baie de Sept-Îles de l’Institut nordique de recherche en environnement et en santé au travail (INREST), qui repère ces animaux lors de son plus récent transect. Il souligne également la surprenante visite de trois rorquals à bosse et d’un rorqual commun dans la baie de Sept-Îles, accompagnés des habituels petits rorquals.
À Franquelin, une collaboratrice aperçoit deux rorquals à bosse tôt le matin du 14 aout. L’un des deux semble plus petit. Est-ce une paire mère-bébé? Même constat du côté d’un collaborateur de Pointe-des-Monts qui observe le lendemain deux rorquals à bosse, dont l’un d’eux semble plus menu.
Les rorquals à bosse Tingley et Tic Tac Toe sont à Mingan cette semaine, toutes deux accompagnées de leur veau. Elles font partie de la quinzaine d’individus aperçus par l’équipe de la Station de recherche des Iles Mingan (MICS). Le chercheur Christian Ramp précise qu’il y a presque autant de rorquals communs dans le secteur. Puis, le rorqual à bosse femelle Aramis, premier bébé de Tic Tac Toe, né en 2007, est aperçu très brièvement dans l’estuaire.
Et ça souffle!
« C’est sans contredit la forme du souffle qui m’a mis la puce à l’oreille », spécifie l’observateur de Pointe-des-Monts qui a vu les deux rorquals à bosse le 15 aout. Le souffle de ces baleines a une forme ovale et s’élève d’environ 3 m. Au moment de plonger, cette espèce lève la queue, révélant le dessous de sa queue; un amalgame de blanc et de noir. Ces baleines plutôt dodues sautent parfois complètement hors de l’eau. C’est la chance qu’a eue une observatrice de Godbout le 12 aout dernier alors qu’elle suivait les activités de deux rorquals à bosse depuis le rivage.
Un souffle en « V » ? Ce souffle typique s’explique par les deux narines bien séparées de la baleine noire. L’absence de la nageoire dorsale est aussi un bon moyen pour la reconnaitre. Ces particularités ont permis à un capitaine du traversier Forestville – Rimouski d’identifier l’une d’elles au large de Forestville le 13 aout.
Malgré tous ces « trucs », différencier les baleines est loin d’être aisé. Les conditions météo doivent être de la partie. Le comportement des animaux influence aussi beaucoup la reconnaissance de l’espèce. Ainsi, une paire de jumelles devient un « allié » précieux pour identifier les baleines. Et encore, des surprises surviennent à l’occasion, comme les thons rouges et les dauphins à flancs blancs aperçus à l’entrée de la baie de Gaspé au cours des derniers jours.
Cette carte représente un ordre de grandeur plutôt qu’en recensement systématique.