Entre le 23 juillet et le 10 aout, le Réseau québécois d’urgences pour les mammifères marins reçoit cinq signalements de carcasse de petit rorqual. Assistons-nous à un évènement de mortalité inhabituel? Après l’analyse des photos, l’équipe du Réseau a pu confirmer qu’il s’agissait bel et bien du même animal chaque fois. Retour sur ce cas qui démontre l’importance de documenter les incidents et qui témoigne de la force des courants.
Le 23 juillet, vers 14 h, un officier à bord d’un cargo observe une carcasse de baleine au large de Matane. Il parvient à la prendre en photo et l’envoie au Réseau québécois d’urgences pour les mammifères marins. Si l’image n’est pas assez nette pour identifier l’espèce, elle permet au moins de reconnaitre qu’elle fait partie de la famille des rorquals. Comment le sait-on? L’animal a des sillons sur le ventre.
Vers 14 h 39, le Centre d’appels du Réseau québécois d’urgences pour les mammifères marins reçoit un deuxième signalement. Cette fois, les photos prises par le témoin laissent voir une bande blanche sur les nageoires pectorales, un trait typique des petits rorquals.
Trois jours plus tard, le 26 juillet, le 1-877-7baleine reçoit le signalement d’une carcasse de petit rorqual à la dérive au large de Cap-au-Renard, Gaspésie, accompagné de photos de la carcasse. La responsable du Centre d’appels, Mélissa Tremblay, a l’œil aiguisé : elle a longtemps participé à la photo-identification des bélugas du Saint-Laurent. Elle scrute les cicatrices sur les photos: ce sont les mêmes que celles vues sur la carcasse de Matane.
Puis, le 5 aout, l’équipe de Pêches et Océans Canada effectue une surveillance aérienne afin de documenter la présence de baleines noires de l’Atlantique Nord dans le golfe du Saint-Laurent. Elle repère une carcasse en mer. L’état de décomposition est avancé, la peau est décolorée par l’eau et on ne peut plus voir de tache sur les nageoires pectorales. Est-ce un rorqual commun juvénile ou un petit rorqual? L’équipe transmet au Réseau les photos. Grâce aux cicatrices déjà présentes sur la carcasse lors de la première observation, il est possible de la reconnaitre.
Le 10 aout, un petit rorqual fortement décomposé s’échoue à Port-Cartier. De nouveau, les photos permettent de confirmer qu’il s’agit de la carcasse du 23 juillet.
Le courant a donc transporté l’animal sur plus de 100 kilomètres, du sud au nord. «C’est rare que l’on puisse suivre une carcasse en mer aussi longtemps et sur une aussi grande distance, témoigne Mélissa Tremblay. Ce cas nous rappelle toute l’importance d’avoir des vidéos et des photos des cas pour en faire un bon suivi.» Un des mandats du Réseau québécois d’urgences pour les mammifères marins est de compiler le nombre de cas par espèce, afin de déceler les anomalies dans les mortalités. La collaboration des témoins a permis d’avoir un portrait juste de la situation.