Les squelettes d’une quarantaine de rorquals datant de millions d’années ont été découverts au Chili. L’ampleur du cimetière et la qualité des fossiles sont exceptionnelles. Ces grands cétacés seraient morts à cause de floraisons d’algues toxiques.

Une quarantaine de squelettes de mammifères marins datant du Miocène (de six à neuf millions d’années) ont été mis au jour dans la période de 2010 à 2012 dans le désert Atacama du Chili. La majorité d’entre eux étaient des rorquals, adultes et jeunes, presque complets, articulés et presque intacts. En plus petits nombres figuraient des cachalots, phoques, un paresseux aquatique et un cétacé ressemblant à un morse. Des fossiles de poissons osseux prédateurs ont été trouvés également.

Les premiers ossements avaient été découverts par les travailleurs de la construction de l’extension de l’autoroute panaméricaine. Le nombre de fossiles s’étant avéré très important, le chantier avait été suspendu pour donner le temps aux archéologues et experts de documenter le site. Le site a été baptisé Cerro Ballena qui veut dire en espagnol « colline des baleines ».

Trouver la cause

Ces fossiles se trouvaient dans quatre couches sédimentaires distinctes et réparties sur le site, dans un état d’accumulation montrant que le mécanisme de l’échouage a été récurrent. Le mécanisme se serait répété plusieurs fois dans une période de 10 000 à 16 000 ans. Selon les analyses, la cause des mortalités aurait agi rapidement et en mer. Les carcasses auraient été enfouies au fil du temps dans le sable d’une plaine supratidale (au-dessus du niveau de la pleine mer) protégée par une barrière naturelle de rochers.

Les résultats de ces travaux ont été livrés dans une publication de la revue Proceedings of the Royal Society, le 26 février 2014.

Si les scientifiques savent que des échouages collectifs ont bien eu lieu il y a des millions d’années, leur défi est d’en trouver la cause. Ils rappellent que les échouages collectifs de rorquals sont extrêmement rares. En dehors des causes liées aux activités humaines des temps modernes, les échouages massifs peuvent être provoqués par les comportements grégaires des animaux, des accidents géographiques de grande échelle et des floraisons d’algues toxiques.

Les algues toxiques

Pour les chercheurs, plusieurs éléments pointent les algues toxiques comme responsables. D’une part, les analyses chimiques des fossiles et de l’environnement dans lequel ils ont été trouvés. D’autre part, le fait que les floraisons d’algues toxiques sont la seule cause naturelle connue, hier comme aujourd’hui, de ce type de mortalités simultanées en grand nombre et touchant plusieurs espèces.

Les floraisons d’algues toxiques sont un phénomène naturel, connu mondialement depuis des millénaires, et maintenant depuis des millions d’années. Elles ont lieu près des côtes et sont favorisées par l’accroissement de la quantité de nutriments spécifiques, tels que le fer, qui leur permet de proliférer. Ces nutriments peuvent être relâchés dans l’eau de mer lors d’importants épisodes d’érosion ou de fortes pluies, et déversés dans les océans par les rivières en crue.

Ces algues toxiques s’accumulent dans la chaîne alimentaire, ingérées par les plus petits organismes jusqu’aux grandes baleines chez qui elles provoquent des lésions neurologiques dont les plus graves entraînent leur mort.

Sources:

Sur le site de la Proceedings of the Royal Society (en anglais seulement):
Repeated mass strandings of Miocene marine mammals from Atacama Region of Chile point to sudden death at sea

Pour en savoir plus:

Sur le site de California Academy of Sciences (en anglais seulement):
Reason Behind Ancient Whale Graveyard

Sur le site de Cerro Ballena (en anglais seulement):
Photos, vidéos, données et images en 3D

Sur le site de Baleines en direct:
Une marée rouge mobilise Urgences Mammifères marins (archives des Nouvelles du large)
Le fer provoque la floraison d’algues toxiques dans les océans (archives des Actualités d’ici et d’ailleurs)

Actualité - 6/3/2014

Christine Gilliet

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